Aprochim : un nouvel incendie, son avenir, et une certaine transparence

Photo de l'explosion d'un four à traitement des PCB - © leglob-journal.fr

Pas de bol ! Aprochim vient de présenter son programme de travaux, le 22 septembre en Préfecture de la Mayenne, d’un montant 550 000 euros démarré en septembre 2016 pour « lutter contre les émissions diffuses » de PCB dans l’environnement, et voilà qu’une explosion suivie d’un incendie de nuit à 3 heures du matin, le vendredi 13 Octobre 2017 vient rappeler la difficulté de retraiter sans danger ce genre de « déchets ». Ce n’est pas le premier « incident » de ce genre dans l’usine de Grez-en Bouère, qui pourrait en conséquence s’acheminer « vers du chômage technique  » pour les salariés.


Par Thomas H.


Ce n’est pas le premier. Joseph Gaudin en compte six en cinq ans. « Le premier en 2012 sur un dépoussiéreur ; puis le 27 janvier, un ouvrier soudait, il n’avait pas été formé. Une autre fois, ça été un compresseur qui a lâché, et puis un autre…le vendredi 10 mars 2017, un feu dans un des broyeurs de l’Usine », le président de l’association Terre et Vie d’Anjou égraine les dates et les faits. Cette fois « c’est heureux finalement que ça se soit produit la nuit. De jour alors que tout le monde travaille, on n’ose imaginer le résultat.  » commente un militant de l’association qui tenait son Assemblée générale dans la petite Salle polyvalente de Grez.

« La porte d’une tonne a été arrachée de l’étuve, dégondée en raison de la montée en surpression à l’intérieur de l’enceinte de traitement des transformateurs lors d’une l’explosion dont on ne connait pas encore l’origine et projetée à plusieurs mètres plus loin dans le hall où l’on trouve six étuves de ce genre » explique le responsable de la maintenance d’Aprochim, Christophe Dureau. De fait, sur l’image fournie par Aprochim lors de l’Assemblée générale, on voit bien le transformateur qui pèse 200 kilos qui a été « sorti  » de l’’étuve, poussé sans doute par le souffle.


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L’explosion a soufflé la porte de l’étuve qui pèse une tonne – image Aprochim

L’endroit où s’est produit l’incendie qui a été rapidement et efficacement maîtrisé par les pompiers représente « 25 % de la surface de l’usine et c’est un passage obligatoire pour le traitement des transformateurs  » explique le nouveau directeur d’Aprochim Florent Mancini qui ajoute en conséquence que « du chômage technique est envisagé  ».

Une direction d’Aprochim qui joue la transparence. C’est tellement peu fréquent dans ce dossier, plombé par des années de quasi-silence et de non-dit, que cela mérite d’être souligné. Florent Mancini répond aux questions, il est ouvert, et porte un regard lucide devant les militants de Terre et Vie D’anjou.

« Je vais vous répondre, dit-il, oui avant 2010 [ les problèmes d’Aprochim ont été révélé en 2011, NDLR] il n’y avait aucun contrôle sur l’environnement ; avant il y a un seul contrôle sur la cheminée (…) oui il y a eu des dysfonctionnements de la part de mes prédécesseurs, et une dérive. A-t-on été réactif à l’époque ? A-t-on mis les moyens ? Je ne jugerai pas !  » Mais le « docteur-ingénieur » comme il se définit, semble – même s’il dit ne pas porter pas de jugement – apporter une réponse quand il pose ces deux questions.

Il explique que « 90% des travaux de confinement de l’usine, de transfert et de captation des fluides sont terminés ». Reste la mise en place d’une « lagune de 1000 M3» pour que les «fluides dépollués de PCB » puissent y être acheminé. Avec comme objectif l’évaporation naturelle. « Au niveau de la cheminée qui propulse l’air de l’usine retraitée à une vitesse de 16 mètres par seconde grâce au nouveau système de filtration, on est cet fois au dessous du seuil autorisé ; et on fait maintenant des contrôles réguliers tous les mois  (…) »


Quand il lui est posé la question de savoir quelle amélioration il a pu enregistrer depuis, le Directeur qui arrive de l’établissement Chimirec de Chinon répond un peu de façon évasive : « l’objectif, c’est de tendre vers zéro concernant les diffus dans l’environnement. »

Mais il semble qu’il y a du chemin à faire pour contrôler cette présence de PCB sur l’environnement qui est pollué de façon insidieuse. Un plan de surveillance a été mis en place. Des analyses sont en cours, elles portent sur des légumes bio, salades, courgettes et choux, spécialement plantés chez des habitants de Grez-en-Bouere qui étaient volontaires.Il s’agit de mesurer les taux de PCB. Il faudra plusieurs mois pour obtenir les résultats.

Quel avenir pour Aprochim qui emploie 35 salariés? « En 2022, il ne devrait plus y avoir de transformateurs au Pyralène en France  ». Florent Mancini rappelle que Chimirec, c’est : « 30 implantations et 250 000 tonnes de déchets par an ». Il est clair selon la teneur de ses propos devant les adhérents de Terre et Vie d’Anjou qu’il faudra trouver de nouveaux débouchés pour l’usine.

À la question posée par un ancien salarié d’Aprochim de savoir si « le projet de transfos étrangers sur Grez est abandonné ?  », la réponse du Directeur d’Aprochim est « non, les experts de l’ONU sont contents de ce qu’on fait à Aprochim et c’est une utilité reconnue (…) il y a encore des appels d’offre ONU en petite quantité, mais ce n’est pas ce qui fera vivre Aprochim ! Aujourd’hui Aprochim, c’est 5 000 tonnes de déchets, 50 % pollués et le reste non-pollué.»» développe Florent Mancini. Et l’ex-salarié de conclure à haute voix : « il y aura donc toujours du PCB ici… » ◼