Le maire de L’Huisserie exposé à un conflit d’intérêt ? – Par Thomas H. 🔓

Jean Pierre Thiot - © leglob-journal.fr
Jean-Pierre Thiot le maire de L’Huisserie en Mayenne – Archives leglob-journal.fr

Jean-Pierre Thiot s’est-il mis en situation de « prise illégale d’intérêts » en ne se déportant pas lors d’un vote d’une délibération en conseil municipal ? La question mérite d’être posée quand on sait que le maire a voté – et fait voter les élu-es – en se maintenant dans la salle du conseil le 21 mars 2024. Un vote concernant notamment une subvention à une association dont il avait dernièrement pris la présidence.


Par Thomas H.


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Pourtant, la municipalité s’est dotée d’un DGS, Manuel Belliard*, qui doit guider le « patron » dans sa prise d’actions en mairie concernant la commune et d’une spécialiste en droit qui peut, en plus, être questionnée à tout moment en cas de doute. Madame Hada Javelle, référente déontologue a été désignée à l’unanimité par le conseil municipal de la commune de L’Huisserie par une délibération du 6 juillet 2023. Malgré cela, Jean-Pierre Thiot le maire qui est censé « faire la police des débats et organiser le bon déroulement de l’assemblée délibérative » aurait commis ce que la justice qualifie d’ « infraction » et le code pénal un « délit ».


De quoi s’agit-il ?


D’un vote en bloc des subventions à des associations de la commune, en présence des élu-es. En fait, c’est l’attribution de vingt et une subventions qui pose problème car elle a fait l’objet d’un seul vote de l’assemblée communale. Sans distinction. Au cours de cette réunion du conseil municipal du 21 mars 2024, il n’a pas été proposé de vote individualisé pour les associations dans lesquels des élus siègent et qui auraient dû quitter la salle du conseil et surtout ne pas prendre part au vote. Or le maire a comme à son habitude a déroulé la formule : « Y-a-t-il des votes contre ? Des abstentions ? Il y a donc unanimité, merci… » . Un vote Pour a donc été enregistré, sans lever la main certes mais virtuellement effectué par les élu-es présents ce soir là dans la salle. Et la seule notification « l’élu n’a pas pris par au vote« , comme il est mentionné dans le procès verbal de la réunion du conseil municipal du 21 mars 2024 est donc inexacte, les élu-es ont voté. Judiciairement, le conflit d’intérêt après enquête et témoignages peut être caractérisé.


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Extrait du procès verbal du conseil municipal de L’Huisserie du 21 mars 2024 – source municipalité L’Huisserie

Dans six associations au total, des conseillers municipaux et adjoints sont membres des conseils d’administration de celles-ci. C’est le cas pour la Première adjointe Anne-Marie Janvier qui émarge au conseil d’administration de l’ « Amicale de Beausoleil » qui a reçu une subvention de 800 €. Le maire est lui président de l’association « AFN et autres conflits » de l’Huisserie (200 €). A ce titre, ils auraient dû se déporter et faire sortir de la salle du conseil tous les élu-es. Pour le vote et y compris pour les débats préparatifs au vote. Si les montants concernant ces subventions semblent peu élevés, il n’en demeure pas moins que selon l’article L. 2131-11 du code général des collectivités territoriales « sont illégales les délibérations auxquelles ont pris part un ou plusieurs membres du conseil intéressés à l’affaire qui en fait l’objet, soit en leur nom personnel, soit comme mandataires.« 


Que peut-il se passer à présent ?


Soit une enquête préliminaire peut être ouverte par le Parquet de Laval qui pourrait par exemple s’autosaisir, ou bien agir après le dépôt d »une plainte auprès du Procureur de la République. Tout citoyen peut en effet faire un signalement au Parquet. Sera-t-il automatiquement suivi d’effets ? Pas certain : au regard du préjudice causé par l’infraction, si elle est caractérisée, le procureur peut estimer que l’affaire n’est pas assez grave pour y donner suite. Autre possibilité de recours devant ces entraves au bon déroulement du conseil municipal de L’Huisserie, le représentant de l’État dans le département, c’est-à-dire le préfet, « défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l’article L. 2131-2 qu’il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission« .

C’est la voie qu’a choisie pour le moment l’opposition au conseil municipal de L’Huisserie. Dans un courrier adressé à la Préfecture, Jean-Marc Bouhours, chef de file des conseillers municipaux minoritaires, demande à Marie-Aimée Gaspari d’ « intervenir auprès de Monsieur le Maire pour qu’il retire et soumette à nouveau cette délibération au conseil municipal dans les meilleurs délais, afin que celle-ci devienne conforme au respect de la loi et, à défaut, de bien vouloir déférer cette délibération auprès du Tribunal administratif. » Comme on pouvait le lire dans la presse des années 90 : « Affaire à suivre » . ◼️


* Le DGS n’a pas souhaité parler à leglob-journal.fr, nous renvoyant vers le maire.


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1 thought on “Le maire de L’Huisserie exposé à un conflit d’intérêt ? – Par Thomas H. 🔓”

  1. Pendant des années les deux élus des deux plus importantes collectivités de la Mayenne (Agglo de Laval, Département) ont pu passer des marchés (pouvant représenter au total des millions d’€) à des entreprises pouvant être (voire étant) clientes de leurs activités privées (avocats d’affaire).
    La passivité ou l’indifférence générale face à ces questions de conflits d’intérêt (et de prises illégales d’intérêt pouvant en résulter) semble appartenir au passé.
    Mais dans le cas de cet article, qu’une subvention municipale de 200 € (somme vertigineuse, on en conviendra) vers une association dont le maire est président (donc bénévole) puisse conduire à une action en justice semble assez incongru. Comment des tribunaux encombrés par des affaires ridicules trouveraient-ils encore le temps et les moyens de traiter les affaires sérieuses?

    Il semble que, selon la loi, le fait pour un élu de se déporter lors du vote d’une décision concernant ses liens et intérêts, le prémunisse sur le plan légal. En matière de probité de la vie publique cela semble bien illusoire.
    Un conseil municipal, ou départemental, sont par définition des lieux d’alliances et donc des lieux de potentiels renvois d’ascenseur.
    L’élu A peut se déporter lors d’un vote touchant ses propres intérêts et la décision peut être emporté par l’influence de l’élu, de l’adjoint ou du conseiller B. En retour, et pour un autre vote, l’élu, l’adjoint ou le conseiller B pourra se déporter s’il est en situation de conflit d’intérêt, conformément à la loi, et l’élu A, par son influence peut emporter le vote favorable aux intérêts de l’élu B.
    En pratique, le chemin du conseiller A est goudronné par décision de la commune et le terrain du conseiller B est rendu constructible par une autre décision de la commune. A et B se connaissent et se déportent à tour de rôle des votes les concernant, et le tour est joué
    Le règle du déport, à elle seule, semble être de pure forme et de peu d’efficacité réelle face aux questions de conflits d’intérêt et de prise illégale d’intérêt. Intervient alors la notion du trafic d’influence. Mais ce délit laisse à priori moins de traces écrites que des votes faisant l’objet d’un compte rendu écrit. Vérifier cela est plus complexe que contrôler une liste de participants à un vote.
    Ce qui nous ramène à la question des moyens dont dispose la justice.

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