Un RN de plus en plus fort qui fleurit des villages en Mayenne

Le second tour et les panneaux electoraux qui parlent avant les résultats définitifs connus...

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D’élections en élections, le vote du FN puis RN est devenu un incontournable… Presque banal, s’il n’était pas surtout dangereux pour le vivre-ensemble et notre organisation démocratique. Il est fruit d’une dédiabolisation-banalisation que la candidate du Rassemblement national a stratégiquement souhaité engager pour séduire un électorat de plus en plus nombreux. Pour « attirer les pigeons » ou bien pour « répondre à une détresse significative », selon le bord politique duquel on regarde l’émergence de ce phénomène politique qui est né dans les années 80. Et la Mayenne n’y échappe pas…

Une terreau fertile

Par Thomas H.


la lettre M sur leglob-journa, emblématique du département de la Mayenne

Malgré une qualité de vie bien supérieure à leurs homologues des villes, – où la pollution, le bruit et la promiscuité peuvent gêner dans la vie quotidienne – et loin de celles et ceux que le Rassemblement national voudrait éloigner de l’hexagone, les petits espaces territoriales loin des agglomérations, comme les villages en milieu rural se tournent, eux-aussi, vers le vote Rassemblement national. C’était déjà le cas pour l’élection de 2017 où le village de Saint-Léger-en-Charnie avait battu le record du village au vote le plus brun de la Mayenne avec un vote record de 53,33% des suffrages pour la candidate FN. Et un taux de vote blanc de près de 7 %. A cette occasion, leglob-journal s’interrogeait déjà sur cette envie de « se tourner vers un parti qui fait son lit sur la haine de l’autre, l’anti-Europe et le repli sur soi » .

Un village en Mayenne, Saint-Léger-en-Charnie où en 2017 « il n’y a pas de chômeur, et pas d’étranger ! » analysait pour leglob-journal une habitante et présidente de l’association de sauvegarde du patrimoine.

En 2022, ce sont aussi des villages. A La Rouaudière, par exemple, où la sénatrice UDI Elisabeth Doineau a été maire de 1995 à 2008 1995, 84 voix se sont portées sur la candidate du RN qui a obtenu 52,50 % des suffrages. Emmanuel Macron, pour qui l’élue mayennaise a appelé à voter avec insistance, il n’a recueilli que 47,50 % des voix… D’une élection à l’autre, Marine Le Pen fait, c’est à souligner, un bon de 20 points, puisqu’elle avait été créditée au premier tour de 2022 de 31, 95% des suffrages.

Autre exemple parmi les trente-sept communes, au total, où le vote brun est arrivé en tête, le village de Lignières-Orgères dans le nord du département. Là, Marine Le Pen a séduit à 56,06 %, 236 votants quand Emmanuel Macron et La République en marche avec 43,94 % ont agrégé sur son programme seulement 185 personnes.


Vote refuge ?


Assiste-t-on à un vote refuge de contestation dans une situation de fracture sociale et territoriale ? Ce qui est certain c’est qu’une forme de colère couve, en tout cas, depuis des années. Selon les témoignages recueillis, il en ont assez de l’obligation de prendre la voiture pour aller travailler, de l’augmentation insidieuse (hors la crise ukrainienne) du prix de l’essence qui plombe les budgets déplacement, de la disparition des services publics de proximité, de l’école qui ferme, du médecin qui lâche le cabinet… Le vote extrême à droite trouve donc en plus un terreau fertile dans une Mayenne où le vote conservateur a été prépondérant. Quand Macron gagne dans les grandes villes, comme à Laval avec plus de 75% reléguant Le Pen à un « petit » 25%, et à Mayenne (67,5% contre 32,5%), la deuxième grande ville à gauche en Mayenne, le vote brun progresse et trouve un terreau fertile dans des villages, en voie de désertification, déconnectés et esseulés, dans la campagne laborieuse et rude. « Mes remerciements vont tout particulièrement à mes compatriotes de province et de campagne » a lancé au soir du second tour Marine Le Pen.



Un podcast avec Guillaume Le tourneur docteur en Sciences politiques publié sur leglob-journal le 7 novembre 2021, à écouter et réécouter pour bien saisir ce qui ce passe en Mayenne avec cette émergence d’un vote principalement tourné vers l’anti-immigration alors que le département, dans un « vote barrage » s’est prononcé à 64,31% pour le Président sortant. Une problématique que les politiques locaux mayennais ne semble pas prendre franchement en compte, ou semblent même ignorer : c’est ce qui ressort des commentaires au soir du premier tour, mais aussi au soir du second.

Si Florian Bercault le maire de Laval « note que la candidate du RN fait son trou, avec un score de plus en plus important« , Jean Arthuis a vu surtout dans la réélection de son candidat qu’il soutient depuis la première heure un « véritable exploit » sans évoquer le RN. Certains élus ont soulevé toutefois une « inquiétude » face au score final du Rassemblement National, et estimé comme Christophe Langouët, le maire de Cossé-Le-Vivien qu’il « faudra se poser la question et y répondre » .

Le Maire d’Evron Joël Balandraud, qui se trouve sur un territoire rural où l’industrie agroalimentaire est très présente, constate qu’ « il y a un vote Le Pen, dans mon canton, tout en ajoutant que les personnes qui ont voté pour elle, ne sont ni fascistes, ni racistes « , légitimant, en somme, le déplacement dans les urnes des voix vers le RN. Quant à Guillaume Garot, il semblait au soir du second tour plus préoccupé par l’abstention que le score de Marine Le Pen « de plus en plus dangereuse […] Comment faire face à l’abstention ? a questionné le député socialiste pour qui « il faut redonner du sens et de la confiance dans la politique » . ◼


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