CFDT-53 : « la Justice (…) montre à Noz qu’il faut respecter le droit syndical»

Entraver la libre désignation de délégués du personnel, et plus généralement faire fi du droit syndical, c’est un délit avec lequel il ne faut pas jouer. Rémy Adrion le PDG de Noz qui avait été condamné par le tribunal correctionnel de Laval le 24 septembre 2015 à deux fois quatre mois de prison avec sursis, pour entrave à la liberté syndicale et prêt illégal de mains d’œuvre à but lucratif, assorti de 5 000 euros d’amende vient de voir sa condamnation confirmée en appel. La Justice à Angers, dans son arrêt, confirme totalement la décision du tribunal de Laval.


Par Thomas H.


« C’est une très bonne nouvelle pour les salariés, les droits dans l’entreprise, le syndicalisme et la CFDT ; l’entreprise était coutumière du fait. », commente Mélanie Allain, la secrétaire départementale de la CFDT en Mayenne. L’entreprise c’est Noz, le soldeur qui a pignon sur rue. 4 500 salariés, plus de 200 magasins au total. C’est un as, l’As des Lots! pour réaliser des centaines de millions d’euros de chiffre d’affaires. «Une superbe réussite économique (…)». Son siège social est situé à Saint-Berthevin, une ville près de Laval.

La cour d’appel d’Angers qui avait examiné le recours formé par Rémy Adrion le 28 avril 2016 a donc rendu son arrêt huit mois plus tard. Elle confirme la totalité des peines infligées en première instance à Laval. Au côté de Rémy Adrion, deux fois 4 mois avec sursis – le PDG n’avait jamais été condamné jusque-là – et une amende de 5000 euros, sept cadres de la société devront s’acquitter de 1 500 € d’amende ; ainsi que des peines de 3 000 € pour chaque société du groupe poursuivie dans ce dossier, soit une petite vingtaine d’entreprises attachées à ce qu’on appelle en Mayenne «la nébuleuse Noz»: RA Expansion, Horizon Développement, Spac Sud, Futura Product, France Invendus, ou bien ICS France pour ne citer que celles-là.

«Pas de passe droit pour Noz»

L’arrêt est comme le disent les gens de justice «contradictoire». Et selon la loi, celui qui conteste ne dispose de seulement 5 jours pour se pourvoir en cassation. L’arrêt a été rendu le 7 février, mais «passé ce délais de 5 jours, le pourvoi ne sera pas recevable».

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Certes le délit d’entrave n’est pas un crime, mais enfin, il est punissable, on le voit. Il est constitué dès lors que l’employeur porte atteinte notamment à la libre désignation ou à l’exercice régulier des fonctions d’un représentant élu du personnel ou d’un délégué syndical. En pratique, et le plus souvent, le délit d’entrave peut notamment prendre la forme d’un refus d’organiser l’élection des représentants du personnel bien que la loi l’impose, lorsqu’on est en présence d’un nombre de salariés supérieur dans l’entreprise à 50. C’est une obligation.

Dans cette affaire, la CFDT de la Mayenne s’était portée partie civile, pour agir en son nom et dans son propre intérêt contre l’accusé.

Elle l’a fait après qu’une lettre lui ait été envoyée par la Dirrecte (la Direction Régionale des Entreprises, de la Concurrence, de la Consommation, du Travail et de l’Emploi) rappelant que les infractions constatées par les enquêteurs allaient être portées devant le Tribunal. La Dirrecte expliquait aussi dans ce courrier reçu par le syndicat qu’il pouvait agir ainsi car il avait « été victime des infractions commises  » par le groupe Noz.

«Il faut une vigilance permanente et faire attention à la maltraitance et aux respect des salariés,, estime Mélanie Allain, la numéro une de la CFDT en Mayenne, je ne suis pas juge, mais l’entrave syndicale, c’est très grave, car cela empêche le dialogue social dans l’entreprise et finalement cela peut peser sur le travail des salariés, et sur la libre expression ; et d’ailleurs beaucoup d’entreprises s’attellent à traiter la question de la souffrance au travail en Mayenne. La Justice n’a fait que valider le premier jugement et montre ainsi qu’il faut respecter le droit syndical (…). Pas de passe-droit pour Noz !  »

Aux enquêteurs de la Direction du Travail qui, à l’époque, avaient interrogé Rémy Adrion, le PDG de Noz avait déclaré en substance en guise d’explication à ce qui lui était reproché que lorsqu’on est bon, finalement, on n’a pas besoin d’être protégé ; petite phrase encore symptomatique consignée dans les minutes du procès verbal des enquêteurs toujours en provenance du PDG de Noz : «il y a quelques années, j’ai eu des délégués […] j’ai réussi à ce qu’il n’y en ait plus.».

Un proche du dossier devait confier à leglob-journal après cet arrêt de la cour d’appel d’Angers confirmant le jugement initial : « Superbe réussite économique que Noz… dommage que ce soit un échec social ! » Pas de commentaire en revanche du coté de l’avocat lavallois, dont on dit qu’il est en vacances, de Rémy Adrion. Selon des sources bien informées, il pourrait y avoir un pourvoi en cassation, «ça ne lui fait pas peur!»