Journalisme : un peu de courage, les « oiseaux » ! 🔓

Une machine Ă  Ă©crire vintage

Possible partout, par chacun! « Notre manière de penser n’est pas un sujet de controverse intellectuelle mais une question de vie ou de mort. » Paroles de l’intellectuel États-unien Howard Zinn, penseur-militant du réel qui ajoutait : « si ceux qui tiennent les rênes de la société – politiciens, chefs d’entreprise et magnats de la presse – se montrent capables de contrôler nos idées, ils sont à peu près assurés de conserver leur pouvoir».


Vous avez dit objectivitĂ©? 

Par Thomas H.


«Aussi nul besoin de soldats dans les rues. Nous nous contrôlerons nous-mêmes! On est moins tenté de protester quand on pense vivre dans une société « pluraliste ». Cette notion est applicable partout.

EngagĂ©, Howard Zinn l’Ă©tait. Cet historien prolifique en pensĂ©es s’est Ă©teint le 27 janvier dernier (2010). Ouvrier d’abord avant de devenir soldat, encore, puis professeur, il aura Ă©tĂ© de toutes les luttes finalement. Il fut Ă  la fois intellectuel et activiste. Pour une AmĂ©rique plus juste, pour les droits civiques l’Ă©quivalent de nos Droits de l’Homme, contre la guerre du Vietnam, «contre les ravages du capitalisme», contre les discriminations raciales et sexistes, contre la guerre d’Irak, etc.

Au dĂ©but de sa carrière d’intellectuel dans les annĂ©es 70, ses Ă©crits furent disqualifiĂ©s car taxĂ©s d’anti-amĂ©ricanisme. Quand on gĂŞne, on est forcĂ©ment mal compris et moins acceptable et acceptĂ©. Et puis, n’est-ce pas plus simple, lorsqu’on veut tuer son chien de dire qu’il a la rage! C’est une pratique courante. HĂ©las.

« Notre manière de penser n’est pas un sujet de controverse intellectuelle mais une question de vie ou de mort. » disait-il, incarnant lui-mĂŞme ce courage qu’il revendiquait pour tous. Une certaine forme de clairvoyance et d’intĂ©gritĂ©. Cela doit ĂŞtre sĂ»rement cela, de faire du Journalisme. ĂŠtre un intellectuel, ceux qui se font si rares de nos jours.

«La neutralitĂ© rend complice» – Dans son mĂ©moire sur « les systèmes d’information pendant la Guerre du Biafra » cette Ă©tudiante française en Histoire et en dernière annĂ©e de Master Ă  l’UniversitĂ© de Rennes 2 Ă©crit dans la prĂ©sentation de celui-ci :

« La sociĂ©tĂ© contemporaine fonctionne grâce Ă  des rĂ©seaux qui gèrent de l’immatĂ©riel, principalement de l’information. Le contrĂ´le de ces rĂ©seaux et la capacitĂ© Ă  les utiliser (pour modifier, propager, masquer, etc.) est devenu l’enjeu du pouvoir […] Le contrĂ´le de l’information se rĂ©vèle Ă©galement poursuit cette Ă©tudiante en Histoire contemporaine, ĂŞtre un excellent et ancien outil de gestion des masses, amĂ©liorĂ© par des dĂ©cennies et des siècles de dĂ©veloppements techniques et technologiques. L’histoire prouve que l’habitude et l’expĂ©rimentation ont aussi eu un rĂ´le Ă  jouer dans cet apprentissage du pouvoir des mots. […]».

De nos jours et plus encore que par le passĂ©, le journalisme ne peut plus se permettre d’être en retrait. C’est-Ă -dire suiviste et accompagnateur. Howard Zinn craignait plus que tout « la neutralitĂ© qui rend complice » disait-il. C’est ce qu’il enseignait Ă  ses Ă©tudiants.

Non aux Journalistes « oiseaux » !

C’est le sens profond du nouveau journalisme qui doit redonner crĂ©dit et reconnaissance aux journalistes. Bien avant la rĂ©unification, GĂĽnter Wallraff avait passĂ© plusieurs mois dans la peau d’un Turc en Allemagne de l’Ouest. Il avait souhaitĂ© rendre compte dans un reportage pour Bild puis un livre, du “racisme ordinaire” dans son pays. En Ă©tant lui mĂŞme dans la peau d’un Ă©tranger parmi les allemands.

Implication, introspection et restitution. Pas nĂ©cessaire d’aller jusque-lĂ . Pas non plus besoin d’ĂŞtre un «infiltré». Pourtant Florence Aubenas a fait la mĂŞme chose plus rĂ©cemment du cotĂ© de PĂ´le Emploi, Ă  sa façon, pour comprendre et embrasser la situation de chĂ´meur.

D’une manière un peu identique Ă  ce que pensait Howard Zinn, GĂĽnter Wallraff, dans un interview Ă  TĂ©lĂ©rama le 15 avril dernier, ne disait pas autre chose. « Un journaliste est un ĂŞtre compatissant. Je ne pense pas grand-chose des journalistes « oiseaux », c’est-Ă -dire qui prĂ©tendent vouloir et devoir faire leurs reportages du haut de leur perchoir, en tant qu’observateurs quasiment neutres. Ceux qui ne veulent pas s’acoquiner avec ceux qui souffrent sont souvent lâches. Ils cachent leur acceptation de cet Ă©tat de fait derrière le manteau de l’objectivitĂ© journalistique. ĂŠtre “objectif” ne veut souvent rien dire d’autre que de perpĂ©tuer un statu quo».

Estimez-vous que vous pratiquez une forme de journalisme politique ? lui avait posé alors le journaliste de Télérama qui ajoutait : êtes-vous un journalisme engagé, militant, qui veut secouer la société ? La réponse de Günter Wallraff avait été sans ambiguïté. « On doit prendre position. Je suis du côté des faibles qui n’ont aucun lobby à leurs côtés. C’est un parti pris, j’en conviens, ce qui ne veut pas dire que c’est un parti pris politique».

C’est clair ! Et quand bien mĂŞme «parti pris politique» ! Car « Politique », ce n’est pas un gros mot, c’est la vie de la CitĂ©. Et un journaliste, en « donnant de la voix » dans le concert du dĂ©bat du moment, quand il Ă©crit, publie, interpelle, questionne, quand il interroge ou bien rapporte, ne fait-il pas de la politique en se mĂŞlant de la vie de la CitĂ©?


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