Leglob-journal : informer, encore et toujours – Par Thomas H. 🔓

Une machine Ă  Ă©crire vintage

Presse

MĂŞme en Mayenne, l’accès Ă  l’information officielle peut ĂŞtre utilisĂ©e comme une arme de dissuasion. Un vĂ©ritable moyen de censure indirecte. Aujourd’hui le journaliste, fondateur du site d’informations en ligne leglob-journal, s’est vu refuser l’accès au banc rĂ©servĂ© aux mĂ©dias au conseil dĂ©partemental de la Mayenne, dĂ©cision du PrĂ©sident Olivier Richefou et par la mĂŞme aux dĂ©libĂ©rations, au motif que nous serions un « blog Â» et parce qu’un article du Glob-journal (sur la Tour Montparnasse rĂ©vĂ©lant un montage financier avec une sociĂ©tĂ© locale) lui aurait dĂ©plu. Cette pratique qui ne respecte pas la diversitĂ©, le pluralisme, la dĂ©mocratie, n’est pas nouvelle. Pourtant leglob-journal est bien un mĂ©dia d’informations en ligne qui a pour vocation de traiter, mettre en forme, et rendre comprĂ©hensible l’information et l’actualitĂ© en Mayenne. Cette façon d’opĂ©rer est un moyen d’abuser de son pouvoir. Et il s’agit aussi, ni plus ni moins, d’une entrave Ă  la libertĂ© de la presse.

Par Thomas H.*


C’est bien de cela dont il s’agit : d’un levier pour dissuader, d’un moyen pour affaiblir et par la mĂŞme sanctionner en confortant son propre pouvoir. La rĂ©tention de prĂ©caution, on l’a vu en Mayenne pour un grand groupe agroalimentaire qui s’est retrouvĂ© dans la tourmente, cela est devenu, Ă  force, contre productif. Mais il peut y avoir aussi la rĂ©tention de sanction. Elle peut ĂŞtre apprĂ©ciĂ©e comme une punition par le censeur qui en use. Mais elle peut signifier aussi indirectement que la dĂ©marche journalistique est pertinente et qu’elle ne fait pas dans la complaisance.

Une presse qui se veut indĂ©pendante et dĂ©rangeante n’a pas bonne presse. C’est vrai au niveau national mais Ă©galement local. Surtout auprès des dĂ©cideurs et d’élus dont on veut bien les crĂ©diter de pouvoirs et d’influence et qui souhaitent par dessus tout des journalistes surtout conformes Ă  leurs aspirations. Cette presse-lĂ , petite et Ă©mergente, avec peu de moyens serait-elle donc si gĂŞnante ?

Pourtant nĂ©cessaire, elle est blacklistĂ©e, ce qui constitue une erreur. Alors la consigne est simple, la presse qui n’a pas bonne presse est exclue des cercles qui se veulent d’influences et d’informations. La boite-mèl ne reçoit plus de contenus : on pratique le silence-sanction. Et on se passe le mot, sans que cela soit dit. Il n’y a plus d’accès Ă  la source d’informations pourtant officielle. Et publiquement, en surplombant la reprĂ©sentation dĂ©partementale, on s’inscrit dans le mensonge. On se dĂ©clare «pour le pluralisme», qualifiant mĂŞme de «populistes faisant le jeu des Gilets jaunes» ceux qui ne rechercheraient que la «polĂ©mique».

Mais qu’on se rassure, c’est un mal pour un bien. Un service rendu Ă  l’indĂ©pendance. DĂ©cideurs, chefs d’entreprises, reprĂ©sentants d’institutions et de l’État sont en concertation et entre-soi. Et la dĂ©mocratie, hĂ©las, n’est pas grandie. Le droit Ă  l’information est Ă´tĂ© et le droit de savoir aussi. L’accès Ă  l’information devient en quelque sorte une arme « soft Â».

Le rapport annuel de l’Observatoire de la dĂ©ontologie du journalisme (ODJ) s’est penchĂ© sur ce qu’il appelle « le mĂ©dia bashing [dĂ©nigrement des mĂ©dias, NDLR] [qui] se rĂ©pand.»

«L’une de ses consĂ©quences, [est] la question du phĂ©nomène des procĂ©dures-bâillons, et [l’ODJ] relève les nombreuses plaintes et menaces de plaintes (…) dĂ©posĂ©es ou annoncĂ©es pour tenter d’intimider des journalistes jugĂ©s trop curieux, notamment de la part d’entreprises comme le groupe BollorĂ© ou le gĂ©ant laitier Lactalis, mais aussi, fait nouveau, de la part du gouvernement et de l’ElysĂ©e Â». 

Il faut bien arriver Ă  comprendre, concernant ce pilier de la dĂ©mocratie, que le journalisme ne peut donc plus se concevoir autrement que comme un combat. Car il est forcĂ©ment de nature subversif. Les anglo-saxons l’ont bien compris qui le mettent en pratique depuis longtemps ; chez nous, il en va tout autrement. A part des mĂ©dias Ă  part ou dits « satiriques Â», cette notion de journalisme engagĂ© effraie. Si un mĂ©dia sort une information, vĂ©rifiĂ©e, recoupĂ©e, issue d’une indiscrĂ©tion, et qu’elle gĂŞne, c’est qu’il  a forcĂ©ment une arrière pensĂ©e de se transformer en officine politique ou bien l’envie de nuire.

Pourtant, apporter de la diversitĂ© d’opinions, du « pluralisme Â» est utile Ă  la sociĂ©tĂ©. Utile au dĂ©bat, utile Ă  l’esprit d’ouverture, Ă  la diversitĂ© d’opinions et Ă  la recherche de la vĂ©ritĂ©. « Parler de et Ă©crire la vĂ©ritĂ©, n’a de sens que si l’on rĂ©vèle la vĂ©ritĂ© qui dĂ©range, expliquait Orwell, pour ce faire, il faut parler de cette vĂ©ritĂ© que finalement personne ne veut entendre Â». Camus affirmait que « le goĂ»t de la vĂ©ritĂ© n’empĂŞche pas la prise de parti Â» prĂ´nant dĂ©jĂ  un journalisme engagĂ©. Il disait aussi : « un journaliste, d’abord, est censĂ© avoir des idĂ©es […] c’est « un historien au jour le jour » dont le premier souci est la vĂ©ritĂ©. Â» 

Rendre la dĂ©mocratie plus sĂ»re 

La loi de 1881 sur la Presse a permis la libertĂ© d’expression qui avait Ă©tĂ© rendue impossible jusque-lĂ  pour les journaux, en raison des rĂ©gimes plus au moins autoritaires. Logiquement, elle a eu comme consĂ©quences certaines dĂ©rives d’une presse trop permissive, mais surtout la crĂ©ation en 1918 du Syndicat national des journalistes (SNJ) qui a fĂŞtĂ© cette annĂ©e ses cent ans ; on lui doit outre le statut du Journaliste et la Carte de presse, la Charte dĂ©ontologique de Munich en 1971 devenue une rĂ©fĂ©rence pour la profession dans l’Europe entière.

La presse anglo-saxone fait plus le job, traquant les dysfonctionnements de la dĂ©mocratie pour tenter de la rendre plus sĂ»re. Son boulot c’est – Ă  travers l’information, et la recherche de la vĂ©ritĂ© – d’avoir une capacitĂ© de nuisance pour gĂŞner et faire la chasse aux abus de pouvoir. De ce point de vue nous somme très en retard, mĂŞme si des progrès ont Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s. Les mĂ©dia sont dĂ©tenus par des puissances Ă©conomiques qui contraignent l’indĂ©pendance. Localement, ce mĂŞme pouvoir Ă©conomique exerce une main mise sur la reprĂ©sentation du pouvoir Ă©tatique ou dĂ©partemental qui bon an mal an  lui rend bien.

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La recherche du fait, de l’information factuelle ne plaĂ®t pas toujours au pouvoir qu’il soit exĂ©cutif, Ă©conomique, politique, culturel ou syndical dont le travail est – reconnaissons-le – de rechercher sa propre vĂ©ritĂ© dans celui du journaliste. Le travail du journaliste engagĂ© dans son mĂ©tier, c’est de s’y confronter, pour l’intĂ©rĂŞt gĂ©nĂ©ral, pour l’honnĂŞtetĂ©, contre la corruption, contre la violence, contre l’exploitation, contre l’abus de pouvoir. Et d’en avoir conscience.

L’indĂ©pendance passe par lĂ . Et qu’on l’admette ou non, nous sommes entrĂ©s dans le paysage mĂ©diatique mayennais. Leglob-journal est un mĂ©dia d’informations avec lequel, il faut dĂ©sormais compter.


*Thomas H. est le pseudonyme de Roland Frezza, fondateur de leglob-journal


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7 thoughts on “Leglob-journal : informer, encore et toujours – Par Thomas H. 🔓”

  1. Merci pour votre excellent journal indĂ©pendant et pour votre travail pour la libertĂ© d’expression dans un pays qui se veut pourtant le creuset des droits de l’Homme. Certains Ă©diles pensent encore que possĂ©der un petit pouvoir leur donne droit de vie ou de mort professionnelle Ă  l’encontre de ceux qui ne pensent pas comme eux. Comme nous l’avons remarquĂ©, le questionnement dĂ©range. Le pouvoir en place n’aime pas ĂŞtre contrariĂ© mais exige que l’on fasse seulement briller son image. On a besoin d’un poil Ă  gratter mayennais tel que le vĂ´tre.

  2. Pingback: Cartes de Presse - leglob-journal

  3. Je laisse parler Robespierre ….

    « Après la faculté de penser, celle de communiquer ses pensées à ses semblables est l’attribut le plus frappant qui distingue l’homme de la brute. Elle est tout à la fois le signe de la vocation immortelle de l’homme à l’état social, le lien, l’âme, l’instrument de la société, le moyen unique de la perfectionner, d’atteindre le degré de puissance, de lumière et de bonheur dont il est susceptible.

    Qu’il les communique par la parole, par l’écriture ou par l’usage de cet art heureux qui a reculé si loin les bornes de son intelligence, et qui assure à chaque homme les moyens de s’entretenir avec le genre humain tout entier, le droit qu’il exerce est toujours le même, et la liberté de la presse ne peut être distinguée de la liberté de la parole ; l’une et l’autre est sacrée comme la nature ; elle est nécessaire comme la société même.

    Par quelle fatalité les lois se sont-elles donc presque partout appliquées à la violer ? C’est que les lois étaient l’ouvrage des despotes, et que la liberté de la presse est le plus redoutable fléau du despotisme. Comment expliquer, en effet, le prodige de plusieurs millions d’hommes opprimés par un seul, si ce n’est par la profonde ignorance et par la stupide léthargie où ils sont plongés ? Mais que tout homme qui a conservé le sentiment de sa dignité puisse dévoiler les vues perfides et la marche tortueuse de la tyrannie ; qu’il puisse opposer sans cesse les droits de l’humanité aux attentats qui les violent, la souveraineté des peuples à leur avilissement et à leur misère ; que l’innocence opprimée puisse faire entendre impunément sa voix redoutable et touchante, et la vérité rallier tous les esprits et tous les cœurs aux noms sacrés de liberté et de patrie ; alors l’ambition trouve partout des obstacles, et le despotisme est contraint de reculer à chaque pas ou de venir se briser contre la force invincible de l’opinion publique et de la volonté générale. Aussi voyez avec quelle artificieuse politique les despotes se sont ligués contre la liberté de parler et d’écrire ; voyez le farouche inquisiteur la poursuivre au nom du ciel, et les princes au nom des lois qu’ils ont faites eux-mêmes pour protéger leurs crimes. Secouons le joug des préjugés auxquels ils nous ont asservis, et apprenons d’eux à connaître tout le prix de la liberté de la presse.

    Quelle doit en être la mesure ? Un grand peuple, illustre par la conquête récente de la liberté, répond à cette question par son exemple.

    Le droit de communiquer ses pensées, par la parole, par l’écriture ou par l’impression, ne peut être gêné ni limité en aucune manière ; voilà les termes de la loi que les États-Unis d’Amérique ont faite sur la liberté de la presse, et j’avoue que je suis bien aise de pouvoir présenter mon opinion, sous de pareils auspices, à ceux qui auraient été tentés de la trouver extraordinaire ou exagérée.

    La liberté de la presse doit être entière et indéfinie, ou elle n’existe pas. Je ne vois que deux moyens de la modifier, l’un d’en assujettir l’usage à de certaines restrictions ou à de certaines formalités ; l’autre d’en réprimer l’abus par des lois pénales : l’un et l’autre de ces deux objets exige la plus sérieuse attention. « 

  4. Mon bon Monsieur (tentative d’empathie),
    Vous vous plaignez de ne pas avoir été admis sur le banc journalistique du Conseil Départemental de la Mayenne ! (tentative de pitié par la compréhension du problème)
    Mais enfin vous n’êtes pas un journal, seulement un blog (tentative d’explication et justification de la sanction). La preuve : il ne s’agit pas du GLOBE JOURNAL mais du GLOB JOURNAL ; Ah , Ah, vous ne savez quoi rĂ©pondre …Si nous vous acceptons , il faudra aussi accepter les autres. (quels autres?)
    Et puis, ĂŞtes-vous vraiment journaliste ? Quand on voit vos articles …(tentative de rĂ©duction des infos parues).
    Par exemple, le coût de la location du CD 53 dans la tour Montparnasse, étiez-vous obligé d’en parler ? (reproche très clair)
    De toutes façons, d’une manière générale, vous ne défendez pas la Mayenne ! Toujours à raconter ce qui se passe ici et là.(sous-entendu : ce n’est pas à divulguer, laissez-nous tranquilles).
    Et le comble, un dossier à charge sur Lactalis ! Vous rendez vous compte du tort que vous causez à l’industrie mayennaise ? (oser comparer des informations vraies à un déni de responsabilité).
    Enfin, Monsieur, il existe un règlement tacite de non agression par la presse. Vous avez franchi les limites. A bon entendeur, salut. (ce n’est pas de notre faute, mais de la vôtre).
    La liberté de la presse ? Je ne vois pas le problème, les places étaient toutes occupées. Désolé pour vous. (ça vous apprendra à écrire n’importe quoi).

    Cher Glob-journal, bon courage à toi. Continue comme ça. Quand on dérange les institutions c’est qu’elles ont des choses à cacher. Elles montrent alors leurs vrais visages : de l’entre-soi, du déni, des reproches. C’est effectivement jouer et abuser de son pouvoir.
    Et le CD 53 s’étonne du mouvement des gilets jaunes…
    Ferait mieux de balayer devant sa porte.

  5. Leglob-journal fait un excellent travail d’information, et il contribue au pluralisme de la presse et au libre dĂ©bat des idĂ©es. Il est ainsi un outil essentiel au service de la dĂ©mocratie et de la participation dans notre dĂ©partement.
    Il est un mĂ©dia indĂ©pendant des pouvoirs politiques et financiers. Son travail d’investigation, qui ne plaĂ®t pas Ă  tout le monde, est indispensable. Il aide Ă  faire de nos institutions locales des « maisons de verre ».

    Leglob-journal fait partie de cette presse alternative qui, dans beaucoup de villes, défrise les féodalités locales auxquelles une décentralisation mal contrôlée a remis le pouvoir intégral entre deux scrutins.
    Les Ă©vènements actuels montrent bien une prise de conscience et un sursaut citoyen qui s’expriment au travers des rĂ©seaux sociaux, avec tous les excès inhĂ©rents.

    Leglob-journal concilie le professionnalisme d’un journaliste avec la libertĂ© que favorise la toile.

    Félicitation pour votre travail, et considérez votre exclusion de la tribune de la presse au Conseil départemental comme un honneur, une décoration (de Noël ?). Je ne doute pas que vos confrères de la presse mayennaise exprimeront leur solidarité.

    1. Il n’aura aucune solidaritĂ© de la part de ces « collègues ». C’est probablement eux qui ont demandĂ© de le blacklister… Et les Mayennais bien informĂ©s connaissent le pouvoir qu’ils ont sur les dirigeants mayennais.

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