Une réforme des retraites imposée par l’UE ? – par Henri Marteau

Un couple de retraités sur un banc - Image Pixabay pour leglob-journal.fr

Opinion

Par Henri Marteau


La belle lettre C sur leglob

Ce huitième projet de réforme depuis 1993, qu’il conviendrait mieux d’appeler démantèlement des retraites s’avère être en fait une émanation de l’Union Européenne, qui en a fait la condition, en contrepartie de la mise en place d’une reforme sur les retraites, au versement à la France du Plan de relance européen. Rappelons-nous le référendum de 2005 qui a mal tourné. Au commencement était le TECE (Traité établissant une constitution pour l’Europe). Les Français ont massivement rejeté ce « traité constitutionnel » . Par référendum.

Un autre traité allait décidé de contourner la décision des électeurs français ; les parlementaires réunis en Congrès le 8 février 2008 allaient voté le « Traité de Lisbonne », Droite et Gauche réunies, le copier-coller de ce qu’avait rejeté les français, mais devenu la clé de voûte de l’emprise de la Commission européenne sur la France.

Pour comprendre comment l’Union Européenne impose la réforme des retraites à la France, il faut se rendre à l’article 121 du Traité sur le fonctionnement de l’Union Européenne (TFUE) dans lequel sont instaurées des Grandes orientations des politiques économiques (GOPE).

Ces « grandes orientations » sont directement pilotées par la Commission européenne qui cherche à faire appliquer des réformes économiques et sociales à chaque état européen. C’est dans ce cadre, celui des GOPE qu’on retrouve la réforme des retraites qui devait être mise en place pour les années 2019 et 2020, mais qui fut ajournée à cause de la pandémie de Covid-19. Celle-ci a bien été demandée par l’UE à la France pour assurer une « harmonisation » des retraites au sein des pays-membres. Tout État qui ne respecte pas ces GOPE peut recevoir une amende de 0,2 % de son PIB. À titre d’exemple, ça aurait pu coûter à la France 4,4 milliards d’Euros en 2019 pour non mise en place de la réforme. 


Le plan de relance : une victoire pour Emmanuel Macron, une défaite pour la souveraineté 


Adopté en juillet 2020, après quatre mois de crise du Covid-19, le Plan de relance européen avait été présenté comme « la victoire d’une Europe unie, et de la France » . Et pour cause, ses deux moteurs, qui avaient bataillé des semaines durant pour convaincre les États dits « frugaux », n’étaient autres qu’Emmanuel Macron et Ursula von der Leyen. 

Ce plan d’un montant colossal de 750 milliards d’euros, et débloqué en emprunts par l’Union Européenne, servait deux objectifs : atténuer les effets des grandes dépenses investies durant la pandémie, et ensuite préparer la double transition numérique et écologique du XXIe siècle européen. 

Cependant, les dizaines de milliards débloqués pour les 27 États membres n’allaient pas tomber dans leur poche sans condition. Ils ont dû présenter un Plan national pour la reprise et la résilience (PNRR). Plus concrètement, ils devaient justifier du bon usage de l’aide et de la bonne tenue de leurs comptes publics pour la durée du plan, soit la période 2021-2027. Le PNRR devait alors se conformer en partie aux critères européens. Comme le rappelait la Commission européenne, les États : « doivent fournir une explication détaillée de la manière dont les recommandations par pays sont prises en compte ». Une bonne note dans le respect de ces recommandations était la condition sine qua non à l’envoi des premiers versements. 

Ainsi, le PNRR de la France contiendra bien sûr cette clause « recommandée » par Bruxelles, où il est précisé : «  La Maîtrise des dépenses publiques repose principalement sur des réformes structurelles, la réforme des retraites notamment » Tout est dit.


Extrait du Plan national de relance et résilience français (PNRR) - copie écran
Extrait du Plan national de relance et résilience français (PNRR) dont l’intégralité se trouve ici

Malheureusement, ce projet de loi de retard de départ de l’âge à la retraite risque de ne pas être le dernier, car 64 ans est probablement une étape pour aller encore plus loin. Pour preuve, en Allemagne, l’âge de départ à la retraite est de 67 ans pour les personnes nées après 1963. Dans quelques années, il faut donc s’attendre à ce que la Commission européenne, demande encore à notre pays de s’aligner sur les pays les moins-disants. Et ça sera encore présenté selon le rituel : « pour maintenir le niveau des pensions, etc. »

Les syndicats ont raison d’appeler la population à se mobiliser, mais ils savent parfaitement que les instances décisionnelles ne sont plus à Paris, mais à Bruxelles. Alors pourquoi sont-ils muets à ce propos ? En continuant à faire dans le mutisme, ils se mettent dans une posture défensive, et sont malheureusement condamnés à organiser des manifestations à répétition, contre un gouvernement national qui n’a plus les moyens de décider en toute souveraineté. ◼


Note : Pour en savoir plus et avoir un avis encore plus éclairé, ce lien vers Toute l’Europe, comprendre l’Europe avec ce fact-checking à propos de ce qui vient d’être développé par Henri Marteau.


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