Tribune – « La réorganisation des urgences par l’ARS ne réglera rien »🔓

Des véhicules pour des interventions en urgence à l’Hôpital de Laval - leglob-journal.fr

Tribune*


la belle lettre L sur leglob-journal

Le comité départemental de suivi des urgences de la Mayenne, auquel participent AUDACE 53 et l’ACCDM, réuni le vendredi 28 mars en visioconférence, a examiné la situation très dégradée de l’accès aux urgences dans notre département. Le manque cruel de ressources médicales empêche le bon fonctionnement des Services d’Accueil d’Urgence et des SMUR en Mayenne et contraint personnels et patients à subir une nouvelle organisation.

« Si j’avais du lard, je vous f’rais bien une omelette au lard, mais je n’ai pas d’œufs » disait une vieille blague russe de l’époque soviétique. « Si j’avais un SMUR, je vous emmènerais bien aux Urgences, mais je n’ai pas de médecin », pourrait-on paraphraser !

La dégradation continue de la situation du service d’urgence de l’hôpital de Laval, depuis plus de trois ans, a précipité les deux autres centres hospitaliers du département dans une difficulté caractérisée, aux dépens de l’ensemble des patients et des personnels soignants mayennais.

Comment l’hôpital support censé, dans le cadre du GHT, être la ressource principale et le pivot en termes d’accès aux soins, peut-il, depuis plus de 40 mois, aller de Charybde en Scylla à mesure que les semaines se succèdent ? Les responsabilités doivent être pointées.

Premièrement, l’État dont les gouvernements successifs, et notamment les derniers en date, ont fait délibérément des choix budgétaires délétères et désastreux et ont refusé obstinément, année après année, de prendre en compte la démographie médicale, l’accroissement et le vieillissement de la population française et de prévoir, ne serait-ce que le remplacement des futurs médecins retraités. L’État a ainsi exposé les citoyens dont l’égal accès aux soins est pourtant garanti par la Constitution de la République, aux déserts médicaux, tant en campagne qu’en ville, tant en médecine« de ville » qu’à l’hôpital.

Deuxièmement, l’ARS, bras armé du ministère, qui a laissé pendant plus de 3 années, la situation aux Urgences de Laval se détériorer, en acceptant, de facto, une organisation de plus en plus dégradée, la nuit, puis le jour, avec des conséquences catastrophiques sur les Centres Hospitaliers de Château-Gontier et de Mayenne, qui ont dû accueillir, en plus de leurs propres patients, ceux du bassin lavallois. Il a fallu, qu’après avoir tenu la barre jusqu’à l’automne 2024, le CHHA et le CHNM voient leur situation devenir totalement intenable, pour que l’ARS semble enfin prendre la mesure de la situation.


lettreguillemetsfrancaisouverture

La dégradation continue de la situation du service d’urgence de l’hôpital de Laval, depuis plus de trois ans, a précipité les deux autres centres hospitaliers du département dans une difficulté caractérisée, aux dépens de l’ensemble des patients et des personnels soignants mayennais. »


Troisièmement, l’organisation interne des Urgences et du SAMU de l’hôpital de Laval qui n’a pas permis d’adapter leur fonctionnement aux ressources médicales disponibles, ce qui a précipité les fermetures et les départs de médecins urgentistes, provoquant une onde de choc et des départs également à Chateau-Gontier et à Mayenne. Tout en reconnaissant une « forte tension » et une « raréfaction de la ressource médicale », l’ARS évoque dans son communiqué un « renforcement de l’organisation » et des centres hospitaliers qui « font évoluer les modalités d’accès à leurs services d’urgence adultes à compter du lundi 7 avril » .

Compte-tenu d’une situation certes difficile, les choses seraient donc organisées au mieux pour améliorer l’accès aux soins ? Qu’en est-il réellement ?

Le recours aux Urgences est désormais régulé 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7 (sauf urgences pédiatriques, psychiatriques, gynécologiques et les maternités). Si les urgences vitales seront prises « en charge dans le lieu adapté à leurs besoins », si les urgences cardiaques seront toujours orientées vers le CHL, tout autre « concurrent » à l’un des trois services d’Urgence devra soit passer par le 15 (ou le 116-117) , soit être adressé par son médecin traitant.

Chacun sait que les médecins libéraux sont déjà débordés et que cela relève du tour de force que de joindre son propre médecin, quand on en a un, en urgence. Reste le 116-117 dont l’accès sature déjà bien souvent avec 70 à 90 appels par jour. Ce que ne dit pas l’ARS, c’est que le Centre Hospitalier de Laval n’est en situation d’accueillir « normalement », que neuf plages sur vingt-huit par quinzaine et que son service d’Urgences est « sans couverture médicale » -nouvelle dénomination pour dire qu’il n’est ni fermé, ni ouvert, mais juste sans médecin !!!- 5 nuits sur 7, et 2 journées sur 7.

Quelle que soit la bonne volonté et le professionnalisme des uns et des autres, le flux de patients va inévitablement se reporter sur Château-Gontier et Mayenne ouverts eux 24/24 et 7/7 mais avec juste de quoi faire face médicalement à ses propres patients, reproduisant en pire (car des urgentistes ont quitté le navire depuis) la situation que nous connaissons depuis des mois. Ce que ne dit pas l’ARS, c’est que rien n’est réglé pour ce qui concerne le SMUR. Le département est à ce jour INCAPABLE de garantir la présence d’un seul SMUR médicalisé (au lieu de trois) sur l’ensemble du département. Il y a une semaine, à nouveau, le département n’avait aucun SMUR avec médecin pendant 24 heures !


lettreguillemetsfrancaisouverture

Ni AUDACE 53, ni l’ACCDM, ne prétend que chacun ne fait pas de son mieux à la place qui est la sienne, médicale ou administrative et ne rejette en bloc les propositions d’organisation présentées par l’ARS, même si elles continuent et continueront à revendiquer trois SAU et trois SMUR médicalisés 24/7 sur le département. (…) mais rien n’est réglé ! »


Ni AUDACE 53, ni l’ACCDM, ne prétend que chacun ne fait pas de son mieux à la place qui est la sienne, médicale ou administrative. Ni AUDACE 53 ni l’ACCDM ne rejette en bloc les propositions d’organisation présentées par l’ARS, même si elles continuent et continueront à revendiquer trois SAU et trois SMUR médicalisés 24/7 sur le département. Les deux associations disent en revanche que RIEN N’EST RÉGLÉ, qu’on ne fait rien d’autre que de gérer une pénurie, et qu’on ne nous fera pas prendre des vessies pour des lanternes en parlant d’ « organisation », d’ « adaptation », d’évolution. Et pourquoi pas d’amélioration ?

La solution, c’est le CH de Laval qui, pour une grande part, la détient. Sans ouverture à Laval, 24/24 et 7/7, ou quasi, les Urgences de Château-Gontier et de Mayenne vont être rapidement étouffées. Laval doit trouver des Urgentistes. L’État est responsable de la situation. C’est à l’État qu’il appartient de garantir un égal accès aux soins pour tous au plus près. Un droit pour celui qui le reçoit implique des devoirs à celui qui est censé le garantir. C’est à l’État de trouver des moyens médicaux pour permettre au CH Laval de maintenir ouvertes ses Urgences, et, par conséquence vertueuse, donner le souffle qui manque au CHHA et au CHNM pour fonctionner convenablement. Mme Catherine Vautrin et M. Yannick Neuder se sont mis à deux pour « gérer » la santé. Ils doivent se mettre à deux pour donner des moyens médicaux à Laval. C’est la seule solution pour sauver les SAU en Mayenne. Sinon, dans trois mois, à nouveau, on constatera la faillite totale. Car l’omelette au lard sans œufs ni lard, ça laisse sur sa faim. Et ventre affamé n’a pas d’oreilles. ⬛


*AUDACE 53 et l’ACCDM sont les signataires de cette Tribune


le slogan du Glob-journal

1 thought on “Tribune – « La réorganisation des urgences par l’ARS ne réglera rien »🔓”

  1. Conditions de travail « mortifères », « management totalitaire », « alertes ignorées »: une plainte a été déposée pour harcèlement moral et homicide involontaire contre les ministres de la Santé Catherine Vautrin et de l’Education Elisabeth Borne pour dénoncer des suicides de soignants de l’hôpital public.
    Cette plainte a été déposée jeudi auprès de la Cour de justice de la République (CJR) par 19 personnes – des soignants et des veufs ou veuves.
    AFP 14 avril 2025.
    La plainte s’appuie sur la jurisprudences Orange suite au procès du management toxique de cette entreprise dans le but d’en faire baisser les effectifs et dont la brutalité avait conduit à de nombreux suicides.

Laisser un commentaire