Laval Virtual : la « zone de risque » et la « cession avantageuse » 🔓

Un des visuels de Laval Virtual Center en 2019
Un des visuels du Laval Virtual Center en 2019, sous la direction de Laurent Chrétien et la présidence de Béatrice Mottier

En 2022 son budget était de près de 2,6 M€ avec des subventions publiques de 1 M€. Leglob-journal.fr avait largement évoqué dans ses colonnes le contrôle qu’était en train d’effectuer la chambre régionale des comptes Pays de la Loire. L’association Laval Virtual qui a développé une activité commerciale jusqu’en 2022 était ciblée pour les exercices 2017 et suivants. Chargée de promouvoir et faciliter l’accès aux Réalités virtuelles et augmentées Laval Virtual est principalement productrice du salon Laval Virtual Europe. Elle assure également l’animation et la gestion du site de Laval Virtual Center à l’entrée de la ville – Verbatim


Par la Chambre régionale des comptes Pays de la Loire


La belle lettre guillemet du Glob-journal

Un salon de référence mais des activités de services très déficitaires – Le salon a une réelle notoriété aux plans national et européen mais des salons concurrents s’implantant en Europe pourrait venir contraindre son rayonnement international [Laval Virtual développe aussi un salon en Chine, NDLR]. L’activité commerciale a eu quelques effets, surtout en fin de période, avec la vente d’espaces virtuels. Il reste que ces activités n’étaient pas explicitement prévues par les statuts et se sont avérées fragiles en l’absence d’un réel plan d’affaires. Elles ont aussi manqué de pilotage et de contrôle par la gouvernance de l’association, mais aussi par ses financeurs, même si des mesures ont été prises ultérieurement. Elles ont enfin contribué à dégrader la situation financière de l’association et ont fait l’objet d’une cession en 2022.

Un Laval Virtual Center sans réel pilotage ni projet d’envergure – Le Laval Virtual Center a permis la réunion d’organismes de formation et de transfert de technologies mais n’a pas donné lieu à l’émergence d’un pilotage unifié et d’un projet stratégique. Or, les thématiques de l’association évoluent au niveau régional et au niveau national. Un positionnement du territoire lavallois est donc nécessaire. Le portage de celui-ci, par une entité plus large impliquant tous les acteurs de l’innovation et du développement économique, est donc préconisé par la chambre.


Une forte progression de la masse salariale


Une dégradation financière qui s’est traduite par une restructuration critiquable – Le compte de résultat de l’association enregistre sur la période [exercices 2017 et suivants] une forte progression des produits et des charges, mais la hausse [des charges] est nettement plus forte, en particulier de la masse salariale. Un résultat d’exploitation négatif apparaît dès 2018 mais il est d’abord masqué par un produit exceptionnel laissant croire que la crise sanitaire de 2020 est la seule responsable. Les dettes ont considérablement augmenté sur la période sous revue en ayant quasiment triplé (2,9) en passant de près de 600 000 € (593 115 €) à près de 1 800 000 € (1 755 751 €) en 2021. (…) Les dettes à l’égard des organismes sociaux, qui sont de moindre ampleur, ont néanmoins augmenté de près de 120 000 € (119 940 €), soit 132 %, avec la plus forte hausse en fin de période (74 % en 2020).

Pour faire face à cette situation dégradée, l’association Laval Virtual a décidé d’engager un plan de restructuration dont la vente des activités de service mais son produit s’est avéré inférieur au coût total de la restructuration. Elle n’aura donc eu aucun effet à long terme. Une amélioration pourrait cependant être observée en 2023 compte tenu des données positives de la dernière édition du salon.


Association Laval Virtual et son directeur général dans son bureau au Laval Virtual Center... Photo Leglob-journal.fr
L’ex directeur de l’association dans son bureau, Laurent Chrétien à quitté Laval Virtual en Juillet 2022 – © leglob-journal.fr

Une cession bien avantageuse


Par ailleurs, tout en étant conforme aux textes, la cession [des activités de service] a pu représenter une opportunité très favorable pour l’ancien directeur de Laval Virtual qui s’en est porté acquéreur. Ces activités très largement financées par les collectivités publiques (3 M€ sur la période) ont en définitive été cédées à hauteur de 300 000 €. La fixation de ce prix initial de cession a été peu étayée par l’association que ce soit dans ces documents associatifs ou lors de l’instruction. Il est, dès lors, difficile de considérer qu’il correspondait à la valeur réelle des activités de service et que les intérêts de Laval Virtual ont été préservés. De plus, en restant en place de manière transitoire, il a pu préparer cette cession dans les meilleures conditions.

Le cessionnaire est le propre directeur de Laval Virtual Laurent Chrétien qui quitte l’association, suite à une rupture conventionnelle, et crée, le 26 juillet 2022, une société par actions simplifiée (SAS) Komodal Group, quelques jours avant la signature de l’acte de cession. (…) Cette cession s’accompagne du transfert, auprès du cessionnaire, de 17 salariés de l’association et de 10 licenciements. Enfin, pendant une année suivant la cession et jusqu’en mars 2023, l’accord des parties prévoyait l’hébergement du cessionnaire dans les locaux du Laval Virtual Center.

Compte tenu du coût final du plan de restructuration (mandataire, rédaction de l’acte, mission d’intérim), évalué à plus de 430 000 € (431 863€) (dont honoraires des cabinets mandatés (243 583 €) et indemnités de licenciement, de préavis et compensatrices de congés payés (188 280 €) versées aux salariés), l’association n’aura donc pu utiliser le produit de sa cession pour rétablir durablement sa situation financière au niveau de ses fonds permanents par exemple. Il n’aura ainsi apporté aucune marge de manœuvre supplémentaire à Laval Virtual.

Même si la procédure de cession est apparue conforme aux textes, la chambre s’interroge sur le montage de l’opération dans la mesure où il apparaît très favorable à l’ancien directeur, repreneur des activités de service. (…) La chambre rappelle cependant qu’il dispose d’équipes formées, certes dans un secteur émergent, mais plutôt d’avenir. La décision de cession a été prise lors du conseil d’administration du 4 mars 2022 alors que le directeur futur repreneur était toujours en fonction. Il était donc au cœur du dispositif sur lequel il a pu influer directement, n’ayant quitté l’association que le 15 juillet 2022 et même s’il n’a participé à aucun conseil d’administration. L’ancien directeur a d’ailleurs lui-même indiqué,dans ses réponses, n’avoir participé à aucun conseil sauf pour « éclairer des demandes, proposer puis négocier la cession »

Une gouvernance et des pratiques de gestion à améliorer – La gouvernance peu ouverte aux entreprises est marquée par une présence insuffisante des représentants associatifs face aux enjeux. Le binôme formé par le président [Béatrice Mottier, l’ex-adjointe de Francois Zocchetto (UDI) ex-maire de Laval, NDLR] et le directeur [Laurent Chrétien] a pu constituer une zone de risque avec un dispositif de délégation qui n’a pu, sur la majeure partie de la période, être documenté ni dans ses contenus ni dans son contrôle.

Le directeur salarié pouvait signer tous les actes et contrats d’un montant inférieur à 90 000 €. (…) Les pouvoirs dont dispose le directeur salarié au titre de la gestion du personnel qui lui est reconnue par les statuts (article 11). Ceux-ci sont de fait très étendus et font du directeur salarié le pilote de cette gestion. Il assure, par ailleurs, la mise en paiement, par ordre de virement, des rémunérations mensuelles sans qu’il n’y ait une validation par un représentant associatif.

L’ancienne gouvernance de l’association [Béatrice Mottier était alors Présidente, NDLR] a d’ailleurs confirmé, qu’elle avait été seulement informée a posteriori des recrutements alors que le conseil d’administration était censé autoriser les créations de postes. Le dysfonctionnement était donc majeur. (…)

En matière de ressources humaines, les rémunérations ne sont pas apparues excessives mais beaucoup de procédures manquent, en particulier pour guider la politique salariale. Il n’existe aucune politique d’achat dans l’association et, compte tenu de sa proximité avec les collectivités publiques, elle pourrait s’inspirer des principes et règles de la commande publique » . ◼


Le président de Laval Agglo a salué « le rôle de Patrick Péniguel qui a permis de renforcer l’écosystème ; nous avons assaini les finances en réalisant une évaluation des actifs avec un comptable… nous avons fait ce qu’on devait faire, un gros travail pour aboutir à la pérennisation de l’association… Je conteste le terme de « cession avantageuse » employé par le rapport de la CRC, il n’y a pas eu de cadeaux… »

Alexandre Bouchet, directeur de CLARTE depuis 2017 est à présent directeur de Laval Virtual dont le Président est Patrick Péniguel, le maire de Changé en Mayenne. Voir la réponse de ce dernier au Président de la chambre régionale des comptes des Payes de la Loire ici et rendez-vous ici pour lire le Rapport complet.


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