Lettre ouverte au Président Macron – Par Kaar Kaas Sonn 🔓

Emmanuel Macron président de la République

Tchad

C’est une Lettre ouverte écrite le 12 août 2021, par Flavien Kobdigué allias Kaar Kaas Sonn. Le Mayennais avait participé avec d’autres personnes à un entretien à l’Elysée au plus fort des évènements qui ont secoué le Tchad. Cette entrevue avec le « Monsieur Afrique de l’Elysée » a eu lieu fin avril 2021, « une première depuis des années » selon Kaar Kaas Sonn qui ajoutait : « Malgré tout, il y avait cette impression atavique que dès qu’il s’agit de l’Afrique, un mélange de racisme et de condescendance naturelle ressurgit » (Lire ici ). Aujourd’hui, quatre mois plus tard devant l’absence de réponse, ce dernier écrit à Emmanuel Macron. Verbatim.

Réclamation au plus haut niveau

Par Kaar Kaas Sonn


Monsieur le Président de la République,

Le 27 avril dernier, par le biais du Conseil présidentiel pour l’Afrique, je recevais une invitation à l’Élysée pour un Échange sur la situation au Tchad en présence de M. Sylvain ITTE, Ambassadeur, Envoyé spécial pour la diplomatie publique en Afrique.

M. Frank PARIS, « Monsieur Afrique de l’Élysée » nous a accueillis et l’échange qui a eu lieu à la Présidence de la République nous a permis de faire part de notre inquiétude.

D’entrée de jeu, il a été question de discuter dans un climat de confiance, car nous étions surpris par cette soudaine envie présidentielle de nous entendre, alors que cela fait des années que nous essayons d’attirer l’attention de l’opinion sur le soutien Français au clan Deby contre les tchadiens. Lors de cette rencontre, nous avions fait savoir clairement que le soutien aveugle de la France à la junte militaire ne présageait pas des lendemains rassurants. Nous avons eu la promesse d’une réponse, car nos échanges devaient être transmis à qui de droit.

Nous sommes en août, soit plus de trois mois et la Présidence de la République Française ne nous a toujours pas répondu. Nos inquiétudes légitimes demeurent entières, et pour cause :

– Pendant longtemps la France nous a bercé de valeurs civilisationnelles auxquelles nous avons adhéré. Cependant, les incohérences de la politique française en Afrique se poursuivent (soutien d’un coup d’État au Tchad et rejet d’un autre coup d’État au Mali).

– Le  Conseil militaire de transition (CMT), mis en place précipitamment, n’est pas un gage de paix durant la transition. La Charte de transition concentre tous les pouvoirs entre les mains du chef de la junte qui n’a aucune légitimité et tout semble aller comme si de rien n’était. Le retour à une transition civile ne se fait pas toujours alors que la diaspora Tchadienne a fait une proposition de charte de transition qui pourrait être le point de départ des discussions avec les forces vives de la nation ;

– Se sachant adoubé par l’Élysée, la junte n’a pas hésité à user de la violence pour réprimer dans le sang (dans un silence incompréhensible de l’Élysée) des tchadiens qui ont manifesté pour exprimer leur désapprobation de la prise de pouvoir dynastique. On dénombre de nombreux morts par balle depuis avril dernier. Par ailleurs, la junte a intensifié le système prébendier et clanique en se partageant tous ;

– Le dialogue national inclusif – avec la société civile, partis politiques, diaspora et toutes les oppositions armées- qui aurait permis de jeter les bases d’une transition apaisée en vue de déboucher sur le retour à l’ordre constitutionnel risque de se transformer en un monologue du pouvoir avec ses propres partenaires sans tenir compte des attentes légitimes des tchadiens ;

– Au final, et cela semble bien le vœu de l’Élysée, la junte est le continuum naturel du régime d’Idriss Déby. Le prochain sommet françafricain aplanira les derniers écueils et la junte pourrait confisquer le pouvoir à son seul profit pour l’éternité. Les peuples français et tchadien ne pourront, comme c’est souvent le cas avec vous, M. Macron, que constater que leurs voix ne valent rien.

M. le Président, votre manque de réponse – qui ferait suite à votre invitation de nous entendre – est un mépris caractérisé, une insulte. Votre présidence a prouvé par le passé son attitude autoritaire et mensongère qui consiste à faire semblant d’écouter des citoyens alors que les décisions sont déjà prises. Nous exigeons des réponses claires à nos questionnements légitimes… Avec notre plus haute considération. ◼


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